UN SALARIÉ PEUT-IL ÊTRE LICENCIÉ POUR AVOIR COMMIS DES FAUTES D’ORTHOGRAPHE ?

 

 

Récemment, les juges se sont prononcés à plusieurs reprises sur la validité du licenciement d’un salarié ayant commis des fautes d’orthographe.

Le licenciement d’un salarié au motif qu’il a commis des fautes d’orthographe est-il valable ?

Le Code du Travail ne reconnait pas expressément ce motif de licenciement du salarié.

L’employeur a en pratique deux possibilités pour licencier un salarié qui a commis une faute d’orthographe : la faute ou l’insuffisance professionnelle.

La faute professionnelle liée à des fautes d’orthographes du salarié n’est en général pas retenue par le juge.  Ainsi, une secrétaire juridique qui écrit un mail de communication de pièces ne sera a priori pas jugée fautive si ce mail est rempli de fautes d’orthographe. En revanche cette secrétaire pourra être considérée comme fautive si elle ne remplit pas sa tâche et oublie d’envoyer ce mail. Sauf exception, l’employeur ne pourra valider le licenciement d’un salarié qui commet des fautes d’orthographe.

« L’Insuffisance professionnelle » a en revanche permis à des employeurs d’obtenir dans certains cas satisfaction devant le juge. Elle peut être définie comme un manque de compétence du salarié dans l’exécution de ses tâches. Bien que présente dans le cadre du licenciement sans cause réelle et sérieuse, elle ne s’analyse pas comme une faute du salarié et s’applique à ceux qui commettent des échecs, des erreurs et des négligences involontaires.

L’employeur qui veut licencier un salarié pour « insuffisance professionnelle » devra mettre toutes les chances de son côté. Il devra proposer des formations nécessaires à l’adaptation de cet employé dans ses nouvelles missions. Il devra aussi donner un cadre précis au salarié pour que celui-ci puisse remplir ses missions en mettant en place par exemple un plan d’action. Les objectifs demandés au salarié par l’employeur devront être atteignables. Pour cela le salarié devra disposer de moyens lui permettant d’atteindre ses objectifs (logiciel correcteur, formation spécifique, etc..)

L’analyse des décisions jurisprudentielles permet distinguer les cas où le licenciement a été déclaré licite par le juge.

Le juge aura tendance à déclarer ce licenciement licite lorsque l’écrit à une importance dans l’exercice de la profession du salarié et exige que ce dernier ne fasse pas de faute d’orthographe. Ainsi, la commission de nombreuses fautes d’orthographe par une dactylo-réceptionniste est évidemment de nature à nuire à l’image et au fonctionnement de l’Entreprise comme tout salarié en contact direct avec les clients (Cour d’Appel d’Orléans, 14 juin 2011 n° 397/11). En revanche, les fautes d’orthographe, certes regrettables, d’un chef de service transport ne sont pas de nature à justifier ni une faute grave, ni même une cause réelle et sérieuse sauf grief pour l’entreprise (Cour d’Appel d’Angers, 23 novembre 2010 n° 09/02856).

L’autre hypothèse concerne la fréquence de la faute causée par le salarié et son impact sur la réputation de l’entreprise qui l’emploie. Ainsi « la rédaction négligée d’un seul courrier qui reste isolé » peut ne pas constituer un grief suffisamment sérieux pour justifier un licenciement (Cour d’Appel d’Orléans, 14 juin 2011 n° 397/11, 11/00036). Il est à noter que les plaintes et réclamations des clients et partenaires commerciaux ne suffisent pas à eux seules à caractériser l’atteinte à l’image de l’entreprise (Cour d’Appel d’Angers, 23 novembre 2010 n° 09/0285).

La licéité du licenciement d’un salarié pour des fautes d’orthographes étant subordonnée à une jurisprudence casuistique de la Cour,  il est nécessaire de se référer à des avocats spécialisés en cas de conflit sur cette question.

Hadrien BAUDENA